mercredi 8 février 2012

Rêves oubliés de Léonor de Récondo aux éditions Sabine Wespieser

Léonor de Récondo est peut-être plus connue comme musicienne avec l'ensemble de musique de chambre baroque L'Yriade. Comme s'il ne lui suffisait pas d'être violoniste virtuose, il a fallu qu'elle s'empare des mots. Impressionnante femme qui n'a pas que des cordes à son violon...
Ama et Aïta sont obligés de fuir précipitamment l'Espagne avec l'arrivée au pouvoir du Front Populaire en 1936. Aïta est directeur d'une fabrique de céramique. Toute la famille se rassemble tant bien que mal chez Mme Eglantine, à Hendaye, avec les frères activistes et les grands-parents pour un temps que chacun espère limité. En Espagne, la guerre civile fait rage.  En France la deuxième guerre mondiale éclate. La famille est à nouveau menacée en raison des activités politiques des frères qui sont envoyés dans le camp de Gurs. Après avoir travaillé dans une usine d'armement, Aïta et Ama fuient à nouveau dans une ferme landaise où finalement l'exil se prolongera bien plus que prévu. Les évènements politiques sont une toile de fond à la vie de cette famille où l'amour rayonne d'une belle force. Alternant narration et journal  où Ama raconte son quotidien difficile de femme au service de la maisonnée, enfants, réfugiés, frères engagés politiquement,  le livre trace des destins simplement. L'effacement de ce qu'était Ama, ses secrets douloureux restent bien scellés dans ce qu'elle sait être essentiel : être ensemble. Malgré la nostalgie d'une vie perdue, son amour pour Aïta la rend si fluide, incroyablement émouvante dans l'acceptation des difficultés. Le livre est une symphonie pathétique, quelque chose comme une histoire qui nait au détour d'une écoute d'un morceau de musique jusqu'à la tragédie finale. Avec une vision presque parfaite du sentiment amoureux, Léonor de Récondo donne à chaque personnage une tonalité, une intelligence à vivre qui est un hymne à "l'être ensemble" d'une famille.
p 30 :  "J'abandonne une partie de moi-même là-bas, au pied des orangers, j'y laisse mes rêves et je prie pour que nous restions unis, en vie. Toujours libres."
C'est simple et même si l'idylle parait parfois trop belle, on suit Ama admiratifs de ses belles certitudes et de ses regards plein de compréhension sur les autres. 

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