jeudi 17 février 2011

La convocation de Herta Muller aux éditions Métaillé

Ce livre, d'une grande force est porté par une écriture vibrante de peur et d'impuissance.  Entre alcool, couple à la dérive et régime totalitaire, il y a une femme convoquée encore une fois, ce jour-là, chez Albu. Elle travaille dans une usine de fabrication de vêtements pour l'Europe de l'Ouest et a glissé des messages dans les poches pour échapper à cette vie de manque, de suspicion. Dénoncée, elle est obligée de se rendre à des interrogatoires incessants, humiliants et effrayants. Chaque geste la rapproche de son tortionnaire. Elle raconte les rituels pour tenter de circonscrire la peur, l'amour qui ne résiste pas à l'oppression. Dans le tramway, se succèdent des descriptions poétiques, évocations de souvenirs et personnages pathétiques fantômes de leur propre vie. C'est un livre terrible où tout est bancal, le bonheur et ce bizarre immeuble au glissement. Des hommes, des femmes, une ville au bord de l'effondrement...Une plongée fascinante dans le monde totalitaire avec la folie en dernier recours. "Quand je me rends à l'interrogatoire, je dois d'emblée laisser le bonheur à la maison. Je le laisse sur le visage de Paul, autour de ses yeux, de sa bouche, sur ses poils durs. Si on le voyait, le visage de Paul serait recouvert d'une couche transparente. Chaque fois que je dois y aller, j'aimerai rester dans l'appartement comme y reste la peur que je ne peux enlever à Paul. Comme mon bonheur laissé là, une fois que je suis partie. Paul l'ignore, il ne pourrait pas supporter le fait que mon bonheur compte sur sa peur à lui."p20
Un prix Nobel 2009 à l'écriture magnifique, surtout ne pas contourner.

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