jeudi 6 septembre 2012

Sale temps pour les braves de Don Carpenter aux éditions Cambourakis traduit de l'anglais par Céline Leroy

Sale Temps pour les Braves est un grand roman américain , très noir dont l'intrigue s'approfondit de réflexions philosophiques et qui met en scène des personnages psychologiquement inoubliables. Un livre fort publié en 1966 sous le titre : Hard rain falling.
 Dans le prologue, on croise les parents de Jack Levitt, fugueurs violents et paumés. Elevé à l'orphelinat, le premier chapitre le situe dans une salle de billard miteuse, trainant une déveine complète.L'ambiance est glauque, parfaitement bien rendue sur fond de voyous désœuvrés.  L' histoire se dessine par retour en arrière brassant l'enfer d'une vie pourrie dès le départ.
p24 "N'ayant jamais connu ses parents, il ne s'attendait pas à ce que l'avenir soit une répétition du passé qu'il ne pouvait pas se représenter - lui au moins avait une vision de l'avenir qui comprenait une sauvagerie gratuite, un enchainement de plaisirs allant grandissant, d'amour et de joies, et s'il fallait lutter pour l'obtenir, cela ne lui posait pas de problème ; il savait se battre pour avoir ce qu'il voulait."
Mais Jack n'est pas  un animal sauvage, c'est effectivement un type sans modèle qui sait parfaitement analyser les autres par instinct de survie. La prison lui a appris. 
D'abord en maison de correction, Jack a cerné les règles, la froide logique du monde carcéral. "Les hommes étaient des éléments dont il fallait s'occuper et qu'il fallait museler - l'essentiel était de ne pas les tuer, rien d'autre ne comptait. Jack ne comprenait pas cette dernière règle, et la seule façon pour lui de l'appréhender était de penser que, si les gardiens tuaient tous leurs prisonniers, ils se retrouvaient au chomage. Soit ça, soit ils n'avaient pas les tripes nécessaires; Il eut beaucoup de temps pour y réfléchir." Jack sait que la violence est en lui avec la rage d'un type enfermé dans une histoire tracée.  Quand il manque de tuer un gardien. il est mis au trou, cent vingt-six jours sans lumière et là Dan Carpenter nous livre des pages terrifiantes sur l'enfermement. 
Puis Jack va rencontrer Billy. Entre eux, une forme de "connection"  pleine de frustration et de tendresse qui lui donnera des clés, l'envie d'être libre et de se prendre en main, de refuser le destin tracé par la société. Là encore de très beaux passages sur l'amitié et l'univers carcéral. Mais peut-on échapper au déterminisme social? C'est sans issue, on referme le livre avec une grande amertume mais respectueux du talent de Dan Carpenter qui signe un roman populaire très abouti, riche et puissant.



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