mardi 12 juillet 2011

L'équation africaine deYasmina Khadra aux éditions Julliard

Yasmina Khadra, ancien militaire, écrit depuis toujours sous un pseudonyme. Il semble que dans son parcours, il voulait être autre, prendre la plume et ranger le fusil, choisir les mots pour lutter contre l'inacceptable comme dans L'attentat.  Dans son dernier livre, Kurt Kraussman est un médecin généraliste qui maitrise plutôt correctement sa destinée lorsque sa femme aimée l'abandonne en se suicidant : "Elle était belle, Jessica. Je crevais d'envie de la prendre dans mes bras; j'avais faim d'elle, de son corps généreux, de ses étreintes orgasmiques".  Gros choc que son ami Hans Makkenroth, riche héritier, alliant sa passion de la voile à l'humanitaire, tente de soigner en l'embarquant avec lui pour les Comores. Parce qu'il faut tout perdre pour connaitre la valeur des choses, de veuf le pauvre Kurt devient otage en se faisant enlever par des vilains pirates qui vont lui faire subir des humiliations et des mauvais traitements. L'Afrique, ce pays de corruption, brûlant de violence et de solitude, le lamine jusqu'à anéantir toutes ses belles certitudes sur le bonheur. Il rencontre Bruno, qui s'est pris un temps pour Théodore Monod, fasciné par ce continent indiscipliné avant d'être enlevé et oublié de tous. Les deux larrons aux antipodes l'un de l'autre feront cependant alliance pour réussir à s'échapper. Des personnages avec une gâchette à la place du cerveau traversent le destin de ce médecin égaré, qui découvre sa violence, celle que l'éducation maîtrise mais que la nécessité de survivre aiguise.  On comprendra que la poésie n'adoucit pas les moeurs mais qu'au contraire les poètes armés sont un brin à fleur de peau et que tout Baudelaire ne suffira pas à calmer l'humanité enragée. Ce n'est pas nouveau et ça me déçoit toujours un peu de le trouver dans un roman. Heureusement, au bout du chemin qui n'est pas le plus Kurt, il y a l'amour et on est content. Ceux qui font des croisières sur des voiliers avec des amis richissimes et généreux dans des mers agités seraient bien avisés de lire ce livre pour comprendre que "le large n'est pas une formidable thérapie" et que définitivement on court moins de risque chez son psy.

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