mardi 15 mars 2011

Anonymes de R J Ellory aux éditions sonatine traduit par Clément Baude

Le premier chapitre sème d'emblée le trouble. Le crime qui va déclencher l'enquête est raconté par la victime pendant qu'elle met en route sur son téléviseur  "La vie est belle" de Franck Capra. Rien que cette scène m'a plongée dans les élucubrations les plus folles. Pendant 688  pages, Ellory est capable de détourner l'individu le plus dévoué à la cause familiale de ses devoirs élémentaires. Petit repas sur le pouce, rocking-chair en vitesse de croisière, je n'ai pas décroché. Depuis plusieurs mois on retrouve des femmes assassinées, une étiquette vierge autour du cou, parfumées à la lavande. Violence extrême, peu d'indices pour l'inspecteur Miller, personnage mélancolique qui mène cette enquête comme on livre son dernier combat. Il n'a rien à perdre, très atteint par une précédente affaire qui l'a sali, il est déprimé  mais pas sans énergie. Il tient un suspect qui lui sert des informations comme s'il l'avait choisi, le manipule et le fascine. Cet étrange John Robey  raconte dans le même temps, en  voix off, son enfance et le Nicaragua, le recrutement par la CIA. Dans l'opacité sordide de ce qui se dessine l'inspecteur Miller de faux pas en certitudes a du mal à croire à l'immensité du complot, à ce que révèlent ces crimes de femmes aux identités fantômes. Les pièces du puzzle se collent une à une pour conclure sur des révélations politiques, rien que l'on ne sache pas déjà d'ailleurs. Le monde est corrompu, on traine tous plus ou moins des histoires personnelles destructrices, on peut avoir un cancer et mourir assassiné, la CIA est sans scrupules et l'attentat contre Reagan un coup monté mais on a besoin de le lire, de se noyer dedans sans oublier l'argent de la drogue et le trafic d'armes en dessert. Miller est un flic sur mesure qui ne dort jamais, ne comprend rien, généreux et maladroit. Avant tout, c'est la construction de ce thriller qui envoute le lecteur, Ellory se montre un grand conteur.

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