dimanche 7 novembre 2010

Un autre monde de Barbara Kingsolver

Embarquement pour le Mexique avec escale en Amérique, l'envoûtement est garanti pour 700 pages et le voyage n'est pas cher pour du haut de gamme. Il s'y mêle des odeurs de cuisine locale, de la politique dans la figure emblématique de Troktsky, une réflexion sur la création avec la peinture de Diego Rivera et Frida Kahlo. Divers styles d'écritures jalonnent ce riche roman qu'il faut attaquer avec du temps devant soi pour ne pas être obligé de le lâcher au risque de se sentir frustré. 
Harrisson Sheperd est un gamin de père américain qui a suivi sa mère mexicaine dans son pays d'origine après son divorce. Dans son enfance désordonnée, balotté au gré des aventures masculines de sa mère et des revers de fortune de ses amants, il trouvera un peu d'affection auprès des domestiques et une exceptionnelle compétence de pétrisseur de pâte qu'il mettra au service de Diego Rivera pour gâcher du plâtre. Son destin est scellé puisque Frida Kahlo tourbillonne pas loin dans ses jupes folkloriques. Entre eux naitra une magnifique affection et une admiration réciproque. Il ne manquait plus que Trotsky hébergé chez ce couple mythique pour que la vie de Harrisson soit définitivement marquée. Il devient le chroniqueur de tout cet autre monde sous la plume de Barbara Kingsolver. Après l'assassinat de Trotsky, Harrisson Sheperd est obligé de fuir aux Etats-Unis où il subira après être devenu un écrivain reconnu le maccarthisme. Avec sa secrétaire, Mrs Brown, sorte de double américain de Frida Kahlo, il forme un duo étonnant de délicates attentions et de tendresse. Dans un enchainement extrèmement bien documenté, toute l'atmosphère sociale et politique d'une époque explose à nos yeux aveugles. Kingsolver nous fait vivre l'Histoire avec une force d'écriture qui mêle journaux intimes, descriptions romanesques, articles de journaux. Ce livre interroge sur l'Amérique et ses excès, la mobilisation nationale dont est capable ce pays, la diabolisation des menaces extérieures, comment les médias relaient, gonflent détournent les rumeurs et les idées.
p641 "La mission de l'art est d'élever l'esprit, ou de payer la facture du chirurgien. Ou les deux en fait. Il peut aider quelqu'un à se rappeler ou à oublier. Si votre maison n'a pas beaucoup de fenêtres, vous pouvez accrocher un tableau et avoir une vue. D'un autre pays, si vous le souhaitez. Si votre conjoint n'est pas beau, vous pouvez contempler un visage ravissant sans que cela vous attire des ennuis. (...)
Ce tableau peut être peint sur un mur public ou enfermé dans un château. Les premiers tableaux que Mrs Kahlo ait vendus l'ont été à l'un de vos célèbres acteurs de cinéma, Edward G.Robinson. L'art est quelque chose que je connais. Un livre a ces mêmes fonctions que je viens de mentionner, particulièrement en ce qui concerne la maison qui manque de fenêtres. L'art en soi n'est rien, jusqu'au moment où il entre dans cette maison."
Vous avez la chance de ne pas avoir encore lu ce livre...N'hésitez pas!

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